Indignés et Anarchistes en Mercedes

By Nita Chicooree-Mercier

Ça aurait fait rire nos amis de la vieille gauche française et Jean François Kahn, le plus vieil adolescent de France, à plus de 70 balais, de voir à plus de dix milles kilomètres de chez eux une marche contestataire initiée par des meneurs à l’allure bling-bling ! On imagine Jacques Julliard, journaliste, historien et fin intellectuel s’exclamer : Eh ben, dites-donc ! Mais pas l’ambassade française nommée par le Président de droite que François Bayrou a décrit dans son livre comme étant ‘anti-France’, l’opposé des valeurs que représente la France. Quelle était la teneur de l’invitation à l’ambassade ?

On connaît l’art et la manière de s’ingérer dans les affaires internes des pays souverains de certaines ambassades.

Encourager la rébellion chez les autres, défendre les opprimés de la terre, les prétendues valeurs universelles françaises. Ou tout simplement en signe de reconnaissance du vocable emprunté à la langue française comme appellation du mouvement : les Indignés. Stephan Hessel est loin de s’en douter que le titre de son petit livre à 3 euros a été fièrement repris pour baptiser un mouvement contestataire dans l’ancienne Ile de France, béni par Marie Reine de la Paix, sanctifié à la Cathédrale et mené par quelques révolutionnaires dernière mode qui se baladent en… Mercedes.

Les anarchistes des années 60 se retourneraient dans leur tombe ! Mais c’est vrai que, depuis, il y a eu la gauche… caviar.

Pauvres Colonisés!

Il paraît que Maurice bénéficie d’une part énorme de l’investissement de la France pour la promotion de la langue française à l’étranger. Les agents de cette noble entreprise ne sont autres que les Mauriciens eux-mêmes. Employés dans des écoles de l’Alliance française dans tous les coins de l’île, ils sont les instruments d’un pays qui n’a rien perdu de son ambition néo-colonialiste. Les petits Mauriciens se voient contraints d’assister aux cours le samedi, chaque point grappillé par tous les moyens compte pour le CPE. La grande Alliance en profite pleinement.

L’extrême-gauche mauricienne avait raison dès le départ. La place de la langue française doit être revue dans le système éducatif. Les enfants sont déjà assommés par plusieurs matières ; il serait plus judicieux qu’ils consacrent leur temps et leur énergie dans les langues et activités qui ont un rapport naturel et légitime avec leur propre culture. Comme dans de nombreux pays asiatiques, les langues étrangères sont enseignées uniquement au niveau secondaire. En tant que langue internationale, on ne peut faire l’impasse sur l’anglais. On doit le promouvoir et le renforcer. Mais le français pourrait n’être enseigné qu’au collège.

Est-ce que les Mauriciens se rendent compte que la France s’acharne à propager la langue française dans leur pays mais qu’elle ne veut pas de Mauriciens sur son territoire ni à la Réunion ni dans les DomTom ? On n’est bon qu’à servir comme instruments dans leur projet d’assimilation linguistique. Qui y trouve son compte ? Les lobbies du privé, les gouvernants, ou les intérêts franc-maçonniques ?

Mais encore…

Il a suffi qu’une journaliste balance ‘Indignez-vous !’ dans la presse pour que tout le monde se mette à sauter comme des cabris en répétant ‘indignés’ à tout bout de champ. Comme si toutes ces têtes pensantes étaient à court d’imagination et d’inspiration ! Une atrophie linguistique. Si tant est qu’elles pensent… Ou alors comme des colonisés ! Se laisser penser. De même, l’expression ‘scandale du siècle’ est reprise et répétée ad nauseam comme si cette formule magique pondue par son auteur entre deux verres de whisky était irremplaçable. C’est d’une niaiserie ! De quel siècle parle-t-on ? Quand on connaît les prouesses linguistiques et la qualité de lecture de l’auteur, on n’est nullement surpris.

Ce matraquage du français dans les médias, à la télévision et au cinéma a fini par envahir l’espace linguistique mauricien. Non seulement on imite, on adopte les idées véhiculées par cette langue. Les médias s’en chargent bien. Le pays se nomme Mauritius officiellement, que l’on sache, ou Maurice. Mais on vous bassine avec ‘l’île Maurice’. L’Ile Maurice figure dans les dépliants touristiques destinés aux touristes de langue française, à moins que les Mauriciens ne voient leur pays à travers le regard de ces touristes. C’est un peu comme la notion du Paradis, véritable superstition pour un grand nombre d’entre nous, et surtout quand il est en Deuil… brrrh !

Cette vision noire et ‘auto-flagellationiste’ nous rappelle un paysage psychologique façonné par des codes culturels et religieux des lointaines contrées, qui nous sont étrangères. On n’a jamais dit que le pays est un paradis. Le rapport avec le pays est différent, et ça, on ne s’est pas donné la peine de l’analyser, trop occupés à imiter et à copier un max. Et dans ce domaine, les médias ne sont pas en reste. Surtout les radios privées, leur modèle étant la France, l’ancien pays colonisateur. Les esclaves étaient bien dressés à l’époque…, c’est vrai. Ça vous gueule dans les oreilles en permanence, ces voix excitées et remontées, ce tempérament latin, alors ! A force de regarder RFO… d’une nullité monumentale !

Ils ne jurent que par la France ; d’ailleurs, on nous rappelle qu’un Mauricien sur deux avait opté pour le rattachement à la France et non pour l’indépendance du pays. La nostalgie… ou l’amertume… reste tenace.

Au fait, dans le sillage des Rs 144 m qui bénéficieraient à toute une famille, on a oublié les Rs 340 000 généreusement versées des fonds publics à une seule personne dans une opération de sauvetage privilégiée. Question de patronyme ? On aimerait en avoir des nouvelles, s’il vous plaît.

Indignés de… marque

Revenons à la Mercedes. On ne s’y attendait pas, merci au journaliste pour les détails parce que ça compte aussi. Est-ce que quelqu’un peut expliquer l’utilité de rouler en Mercedes à Maurice ? C’est fait pour les longues distances en ligne droite sur les autoroutes kilométriques dans les grands pays. Et les autres ‘jeunes’, ils sont venus comment, eux ? En Mercedes aussi ? A la longue, on devient paranoïaque, et dès qu’une formation structurée se met en place avec meneurs et adhérents, le roman d’Orwell s’impose à notre esprit, c’est-à-dire, derrière une nouvelle ‘idéologie’ qui se veut novatrice, on entrevoit les coups fourrés, et on revoit ce pauvre Boxer qui s’est tué au travail par excès de zèle et a fini à l’abattoir par la trahison des chefs utopistes qui ressemblaient en fin de compte à ceux qu’ils dénonçaient. Nous sommes tous égaux mais…

Les lunettes de soleil étaient de marque aussi ? La montre Rolex, peut-être. C’est vrai que quand on manipule l’image, on soigne bien la sienne. Et l’autre dans une 4X4 ! C’est fou ce qu’on aime acquérir tout ce que les grands capitalistes exportent, il fallait voir l’engouement des Mauriciens lorsque ce type de véhicules a été introduit ici ! Utile sur les terrains difficiles dans les grands pays. Ici, on sacrifie les valeurs sur l’autel du consumérisme et de l’apparence. Et le lapsus… présentés comme dirigeants, le pouvoir au masculin, c’est incorrigible ! Après cette montée de tension et d’adrénaline, le Caudan avec ses symboles franc-maçonniques et ses produits haute gamme sauf pour la cuisine offre un cadre idéal pour se détendre… et consommer du kitsch.

Le mythique Che Guevara avait noté l’anecdote suivante dans son journal. Dans ses péripéties révolutionnaires en Afrique, il avait demandé au jeune Laurent Kabila ce qu’il comptait faire si un jour il était amené à diriger son pays. Ce dernier lui avait répondu qu’il se procurerait une belle voiture et de belles femmes… Quelle tristesse, avait noté le grand Che, avec des dirigeants comme ça, l’Afrique n’est pas prête de s’en sortir. Il semblerait que la peau du lion ou la corne de buffle, trophées de chasse étalées devant la demeure des mâles en Afrique gonflaient leur ego et rehaussaient leur image, et que la mentalité s’est perpétuée, il n’y a que l’expression qui a changé. De nos jours, c’est la voiture. Le culte de la voiture chez les descendants dans les Dom-Tom, ça existe aussi. Là-bas, c’était le lion, le buffle et autres bêtes sauvages. Dans les déserts plus au nord, c’était peut-être le chameau… sans oublier la gazelle.

Vaste Programme… des grands combats

Communalisme : Lorsqu’on remarque le patronyme de ceux qui ont manifesté beaucoup d’enthousiasme ‘across the world’, on a tout compris. Enfin, on se ‘retrouve’ entre ‘nou banne’, on est sur l’avant-scène, bien visible. Big deal. Heureusement qu’on n’a pas essayé de faire croire que le briani (dont on a fait l’historique au cas où vous l’ignoreriez) unifie le peuple.

Développement ‘soutenable !’ : il va falloir repasser. Faudrait montrer la facture de carburants de la Mercedes et des 4X4 aux futurs adhérents de Cité Valligee et Camp Levieux.

Démocratie citoyenne : Il y a les meneurs et les paroles censurées de ceux qui n’obéissent pas à l’aveuglette. Ça commence bien. Ou plutôt un héritage culturel… Et on connaît l’intolérance et l’arrogance des simples gens de la gauche en France, le grand modèle.

Et l’avenir appartient…

Soyons sérieux. A quelle heure se lève la génération Facebookers le samedi matin ? Certains, se plaignent les parents, sont incapables de mettre de l’ordre dans leur chambre et se laissent allègrement prendre en charge par leurs aînés. Et alors, mettre de l’ordre dans le pays…

Une social activist irakienne citait une phrase de Gandhi comme source de son inspiration dans son combat contre la guerre, la violence et l’autoritarisme : Be the change you want to see. Ici, on s’identifie au ‘printemps arabe’. Ça en dit long….


* Published in print edition on 16 September 2011

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