Au-delà des étoiles

Que ferions–nous sans le cinéma ? Sans la possibilité d’assister à une mise en scène de l’imaginaire où la fiction se mêle à la réalité dans un décor grandiose, avec des acteurs et actrices de talent ?

Par Nita Chicooree-Mercier

Toute une génération voit ses plus belles années enterrées avec la disparition des icônes qui ont marqué sa quête de rêve, de magie, de fantaisie et de beauté sur le grand écran. La France a été l’un des pionniers qui a porté le septième art à son apogée en offrant au monde des acteurs et actrices légendaires. L’annonce du décès d’Alain Delon tourne la page d’une époque glorieuse du cinéma français et porte un coup au cœur de tous ceux qui ont tant aimé ces étoiles qui ont éclairé leur vie sur terre. Après Belmondo, c’est le dernier monstre sacré du cinéma français qui nous quitte.

“Dans le rôle de voyou, flic ou séducteur, Delon reste l’incarnation de la beauté masculine à l’écran. Incontestablement, il fut le plus bel homme de l’écran en France, et aussi reconnu comme tel dans le monde entier. Un Apollon venu d’Italie à l’âge de quatre ans et qui a contribué à l’image de la France et fait rêver des milliers de femmes à travers le monde…”

Les stars sont les rares personnes qui suscitent une émotion partagée par les peuples à travers le monde, au-delà des différences culturelles, ethniques ou religieuses. La reconnaissance de leur talent et la force de leur charisme transcendent les frontières. C’est la magie des arts, des lettres, de la poésie et des chansons qui s’opère en toute liberté et embellit nos vies.

Dans le rôle de voyou, flic ou séducteur, Delon reste l’incarnation de la beauté masculine à l’écran. Incontestablement, il fut le plus bel homme de l’écran en France, et aussi reconnu comme tel dans le monde entier. Un Apollon venu d’Italie à l’âge de quatre ans et qui a contribué à l’image de la France et fait rêver des milliers de femmes à travers le monde. Depuis deux ou trois ans, la photo en noir et blanc de Delon et de Brigitte Bardot au temps de leur jeunesse orne les arrêts d’autobus et autres lieux à Paris. Aucun artiste contemporain n’est susceptible de susciter une telle émotion que ces deux beautés légendaires dans le cœur du public.

Malgré leur âge avancé, ils conservent le palmarès de la beauté de jeunesse à travers le temps. Consolons-nous du fait que le poids de l’âge, malgré son effet dévastateur sur le physique, ne lui ait pas infligé de grandes souffrances durant ses dernières années. Il était à craindre que les dieux jaloux ne le réduisent en pièces à la fin de sa vie après l’avoir envoyé sur terre en toute beauté rayonnante pour le bonheur des mortels. Que les dieux le reprennent parmi eux au-delà des cieux. Merci à Alain Delon d’avoir exalté les heures arrachées à nos occupations quotidiennes. C’est un des rares acteurs, avec Belmondo, Ventura, Montand et Gabin, dont on peut voir trois films d’affilée sans s’ennuyer.

Ainsi partent ceux qui agrémentent nos vies : écrivains, artistes, chanteurs et chanteuses, comédiens et acteurs. Selon nos affinités et nos penchants, les écrivains sont des personnes qui nous accompagnent toute une vie, des éclaireurs de notre parcours, depuis l’adolescence jusqu’à l’éternité d’une vie, tout au long d’un parcours où de multiples interrogations taraudent notre esprit en quête de reconnaissance et de réponse. Ils sont les fidèles compagnons de toute une vie. Que serait la vie sans la poésie des chansons ?

L’homme des cavernes a dessiné tant bien que mal la vie autour de lui sur les pierres, et sa sensibilité s’est exprimée aussi à travers les chants. Au plus profond d’eux-mêmes, les êtres humains sont porteurs de transcendance, de poésie et de beauté. Que ferions-nous sans le cinéma ? Sans la possibilité d’assister à une mise en scène de l’imaginaire où la fiction se mêle à la réalité dans un décor grandiose, avec des acteurs et actrices de talent ?

À Maurice, nous sommes nombreux à avoir la chance d’être fans du cinéma indien et occidental, des chanteurs des deux côtés. Ce qui augmente notre peine de les voir disparaître un après l’autre !

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Nous nous permettons de nous adresser à la France, aux gouvernants et au public français. Compte tenu du délitement général dans tous les domaines, de l’art où la vulgarité se veut artistique (le spectacle d’ouverture des JO, par exemple), de l’héritage de Mai 68 et bien avant, où tout est permis, du pourrissement de l’ordre public où toute autorité est forcément mauvaise, et de la perte des valeurs en France et dans de nombreux pays, il serait utile qu’il y ait un rappel à certaines choses qui régissent la vie en société. Le respect dû aux défunts relève du bon sens et de l’éthique dans toutes les cultures à travers le temps.

Avant même les funérailles de la légende que fut Alain Delon, une pluie d’insultes s’abattit sur lui. C’était prévisible venant d’une partie d’un public se croyant investi d’une obligation à porter un jugement sur la vie privée des célébrités. Le bûcher de l’Inquisition ne se fit pas attendre pour s’ériger en toute vitesse pour insulter, condamner et clouer au pilori le coupable accablé de tous les maux. C’est affligeant, exaspérant, révoltant et choquant. Une icône est adulée pour son talent et son image d’artiste. Sa vie privée ne regarde que lui et ses proches.

Faudrait-il apprendre le sens de la retenue dans le langage, la politesse, le respect des défunts et la douleur de la famille ? Qui se charge de refaire l’éducation de cette fange grossière, médiocre et immature ? Le fanatisme idéologique d’une partie des gens qui se réclament de la gauche est bien connu. Ils sont anti-riches, anti-capital, anti-star, anti-ceci, anti-cela. Aveuglés par l’endoctrinement, ils ne respectent rien et s’enlisent dans la haine de soi. Delon défendait l’identité catholique du Liban dans les années 80 en pleine guerre civile déclenchée par les réfugiés palestiniens. N’avait-il pas le droit ? Heureusement que l’amnésie a fait oublier cet épisode. Sinon, il se ferait traiter de fasciste en plus de l’étiquette de raciste que son amitié avec J.M. Le Pen lui a valu. On marche sur la tête.

Lorsque nous voyons le niveau médiocre des nouveaux recrus de l’extrême gauche et certains gauchistes tout court, il est risible de les voir s’agiter en donneurs de leçons, et se croire héritiers de la culture, de l’intelligence, de l’humanisme et de valeurs morales. D’où leur propension à tout juger, à ne respecter rien ni personne. Il faut espérer que la politique d’intégration des immigrés n’inclut pas une invitation à la vulgarité, à la médiocrité, au non-respect des autres et au fanatisme idéologique, qui forment un véritable repoussoir pour la France.

Il faut se ressaisir, apprendre la délicatesse, la politesse, la retenue dans le langage, et le respect des autres. Il nous reste Brigitte Bardot, dernière icône du cinéma français. Espérons que d’ici là, les uns et les autres s’abstiendront de verser leur bile sur la place publique.

Mauritius Times ePaper Friday 23 August 2024