« Bérenger a raison. Le commencement de la fin de tout gouvernement débute dès la prestation de serment »
|Interview – Yvan Martial – Journaliste
‘Si impopularité il peut y avoir contre le gouvernement Lépep, c’est bien parce que ce qu’il entreprend depuis le 10 décembre 2014 tourne le plus souvent dans le vide’
Dans les sociétés contemporaines, tout homme ou femme politique n’est pas à l’abri des dénonciations. Les exemples ne manquent pas et, récemment, les médias mauriciens ont exposé un certain nombre de problèmes relevant de l’éthique personnelle avant tout. Si les médias font leur travail, qu’en est-il des autres politiciens et des citoyens ordinaires ? Yvan Martial, journaliste et observateur de la société mauricienne répond à nos questions.
* Mauritius Times : Il semblerait que la cote de popularité du gouvernement Lepep serait actuellement à son plus bas depuis son arrivée au pouvoir en décembre 2014. Cette « chute » de popularité n’est pas forcément aussi réelle que ce que l’on croit. Selon vous, est-ce que c’est vraiment réel, ou est-ce une perception véhiculée par la presse — écrite et parlée – et transmise avec un effet multiplicateur par les gens eux-mêmes ?
Yvan Martial: Vous parlez de gouvernement Lépep. C’est celui que l’électorat mauricien a souverainement plébiscité, le 10 décembre 2014. Nous lui avons accordé un mandat gouvernemental de cinq ans, se terminant en 2019, à moins que d’ici là, il rende son tablier.
Ce n’est heureusement pas dans les habitudes d’Anerood Jugnauth de lâcher un poêlon, sous prétexte qu’il est brûlant. Il laisse cela généralement aux Militants. Tout gouvernement qui s’entête à soigner sa « popularité » creuse sa tombe avec ses dents. De plus, il le fait en pure perte. Qui ne devient pas forcément impopulaire en se voulant populaire…
Pour pareil crime, certains voient même de toutes les couleurs, jour de fête ou pas. Un gouvernement gouverne et qui gouverne devient forcément impopulaire surtout s’il doit entreprendre, par exemple, un grand nettoyage. On ne peut pas nettoyer et vouloir rester l’ami et protecteur des déchets. Tout gouvernement digne de ce nom fait ce qu’il croit devoir faire, sans chercher à savoir s’il devient impopulaire ou non. L’électorat ne lui renouvellera peut-être pas sa confiance en lui refusant sa réélection. Et après ?
Winston Churchill et Charles de Gaulle ne sont pas réélus, après le Seconde Guerre mondiale, après avoir littéralement sauvé le Monde Libre de la folie hitlérienne. En quoi leur défaite électorale, qui fait surtout honte à leurs vainqueurs, diminue d’un iota la place messianique qu’ils occupent au milieu de notre 20e siècle ?
Soyons assez intelligents pour n’exiger aucune quête de popularité de la part du gouvernement que nous avons élu. Exigeons plutôt qu’il nous gouverne, non pas selon les promesses électorales mensongères auxquelles il a dû sacrifier pour obtenir notre vote adhésif mais selon les meilleurs principes administratifs afin de consolider notre développement économique et mieux sauvegarder la qualité de vie terrestre des enfants de nos enfants.
Notre presse est heureusement davantage neutre par rapport à d’autres temps. Nous avons connu ainsi une presse, dans les années 1969-83, à la solde ou presque du MMM. On trouvait même et à foison des journalistes-militants enragés dans les salles de rédaction de journaux gouvernementaux ou affreusement capitalistes, pour ne rien dire de notre MBC/TV. Ce parti n’a qu’à s’en prendre à lui-même s’il n’a pas su thésauriser ce capital de sympathie médiatique.
Auparavant nous avons connu une presse divisée sur des clivages, entre autres politiques, mais aussi racistes, s’opposant violemment à propos du débat – Inde et dépendance et intègre et ration.
Notre actualité politique est suffisamment vaudevillesque pour que des journalistes se contentent du : « Pouah ! de la soupe populaire journalistique, des conférences de presse hier encore hebdomadaires mais, désormais, en passe de devenir bihebdomadaires.
Hier, il nous fallait, à nous journalistes, forcer l’intimité de quelques alcôves pour surprendre quelques secrets d’oreillers. Aujourd’hui, nous n’avons qu’à tendre un micro pour que le plus discret de nos politiciens s’empresse de confesser les péchés de son ennemi préféré, son meilleur ami de demain. Nous, journalistes, ne cherchons plus à informer le Peuple et même à le former. Nous préférons, de beaucoup mais bien paresseusement, savoir ce que le Peuple pense et attend de nous, pour lui débiter, dans nos médias de plus en plus débiles, ce qu’il ne demande pas mieux d’entendre complaisamment. Voilà pourquoi nous multiplions des micro-trottoirs absolument insignifiants.
Les échos journalistiques des débilités débitées sur Facebook ressemblent à ces robinets restés ouverts sans que personne ne s’émeuve du gaspillage de cette eau tellement précieuse. Hier, nous, journalistes, nous glorifions de tendre un miroir au Peuple. Aujourd’hui nous nous contentons de lui tendre un micro. Entretemps, nous sommes devenus des perroquets.
Nous comprenons surtout que nos gouvernements successifs feront n’importe quoi pour maintenir tel quel le système électoral le plus inique qui soit et que nous ont légué nos anciens maîtres colonialistes et donc anglais. Cela leur convient tellement qu’ils préfèrent la morosité de cinq ans de « carreaux cannes » plutôt que de devoir partager les délices du pouvoir avec des adversaires, en raison d’obligations de partage, créées de toutes pièces par toute représentation proportionnelle même à faible dose.
* On aimerait croire que les Mauriciens sauront comprendre que la concrétisation des grands chantiers, donc le redémarrage économique, la création d’emplois – mais aussi le « deuxième miracle économique » — vont prendre le temps nécessaire , mais y a-t-il une autre/d’autres explication/s à cette chute de popularité du gouvernement ?
Le seul miracle économique que nous connaissons, c’est celui qui permet à tant et tant de familles mauriciennes, à jamais incapables d’obtenir un prêt d’un millions d’euros au Libor Rate ou d’acheter de la couleur en poudre par balles sinon par tonnes, mais qui parviennent quand même à faire bouillir la marmite familiale jusqu’à la fin du mois et l’arrivée de nouveaux revenus mensuels.
Tel ou tel politicien de bas échelon peut se vanter d’avoir réussi à lui tout seul tel ou tel miracle économique. Je préfère, et de beaucoup, l’humble et discrète ménagère, tous les jours capable de mettre tout l’amour, la tendresse, dont elle est capable, dans l’assiette de chacun de ses enfants mêmes adoptifs.
Quant à la création d’emplois, c’est d’accord mais à condition qu’ils soient productifs. Là encore, je préfère l’humble entrepreneur, femme surtout, capable de créer de toutes pièces un gagne-pain honnête et digne pour tous les membres en chômage d’une maisonnée plutôt qu’un ministre cherchant à caser les rejetons de sa maîtresse ou de son amant.
Ne demandons surtout rien à aucun gouvernement pour venir en aide à qui cherche vraiment à se libérer de l’esclavage de la misère quotidienne. Trop de politiciens sont avides de se jeter sur la moindre nouvelle opportunité pouvant, à ses yeux, soit lui remplir davantage les poches, soit soutirer des parasites infects mais électoralement intéressants car désespérément clientélistes.
Si impopularité il peut y avoir contre le gouvernement Lépep, c’est bien parce que ce qu’il entreprend depuis le 10 décembre 2014 tourne le plus souvent dans le vide et n’aboutit à rien. Le Peuple finit par se demander s’il est capable de faire mieux que son prédécesseur.
A quoi cela sert-il de démasquer à grands renforts de caméras de télévision des coffres-forts bourrés de devises étrangères s’il n’y a pas de suite au prochain numéro ? Toutes les histoires que débite ce gouvernement Lépep veulent commencer sur la note la plus sensationnaliste qui soit mais pour buter, quelques encablures plus loin, sur un calme plat désespérant. Cela commence à devenir lassant. Il nous sera difficile de supporter pareille léthargie jusqu’en 2019.
* Parlant de l’affaire Lutchmeenaraidoo récemment, Paul Bérenger disait que «c’est le début de la fin du gouvernement ». Il est le leader de l’opposition, et il est de son droit de tenir un discours politique. Mais le gouvernement dispose d’une majorité confortable pouvant lui permettre de tenir jusqu’à la fin de son mandat – qu’il y ait une partielle au No. 7 ou au No. 6 éventuellement… Faut pas, comme dirait l’Anglais, « jump the gun », non ?
Bérenger a raison. Le commencement de la fin de tout gouvernement débute dès la prestation de serment de sa première fournée ministérielle sinon avant, si la pâte a été mal pétrie avant l’enfournement. Chaque jour qui passe rapproche tout gouvernement de la fin de son mandat électoral, du moment donc de devoir rendre des comptes au cours d’une inévitable campagne électorale avec un électorat heureusement de plus en plus exigeant parce que moins bon enfant, plus intelligent, plus sceptique. Rien de nouveau d’ailleurs.
Ne commençons-nous pas à mourir dès le lendemain de l’achèvement de notre croissance pubertaire, sinon de notre naissance ? Le seul gouvernement crédible serait celui qui, dès son entrée au Pouvoir, clamerait son refus irréductible de solliciter sa réélection. Lui, au moins, pourra gouverner sagement sans être obsédé par sa réélection.
Bérenger a besoin de se gargariser, soir et matin, avec des formules creuses, du genre « le commencement de la fin », le « gouvernement doit démissionner » « élections générales avant la fin de l’année » (mais sans préciser laquelle). Il fait cela pour se convaincre qu’il n’a pas encore disparu de notre scène politique. Il reste encore, à sa droite comme à sa gauche, quatre ou cinq assesseurs qui consentent à assurer la claque, la faisance-valoir, à l’occasion de ses deux conférences de presse hebdomadaires. Il n’est même pas capable d’avoir un journal militant digne de ce nom.
Effectivement, ce gouvernement Lépep dispose d’une majorité gouvernementale des plus confortables. Mêmes ceux qui voudraient ruer dans les brancards se contentent de vagues menaces par journaux interposés. Cela leur permettra, en cas de rotin brandi, de recourir à l’excuse facile du Lis sa Pamoa . « J’ai été mal rapporté…Sniff !…Sniff !…On m’attribue des propos que je n’ai jamais tenus…sniff ! ».
Admettons, pour des besoins purement hypothétiques, qu’il y ait prochainement des partielles aux Nos 1, 6, 7 et même 9. Admettons même que Navin Ramgoolam, malgré le handicap de ses coffres-forts et sacoches bourrés de devises étrangères, soit élu haut la main (ce qui n’étonnera personne, vu l’amnésie frappant si cruellement notre électorat) qui cela embarrassera, sinon Paul Bérenger ? Que fera-t-il en pareil cas ? Aura-t-il de nouveau la gracieuseté de 1993 de céder son fauteuil de chef de l’opposition à son ancien allié de 2014, Navin Ramgoolam ? Ou attendra-t-il une magouille travailliste et… patriotique pour se retrouver en minorité dans son pré carré de l’opposition ?
Nous comprenons mieux que Sir Anerood Jugnauth… répugne, mais aujourd’hui seulement, à accorder le moindre intérêt à pareille fadaise et qu’il repousse du revers de sa solide main une si piètre attaque.
* Cependant, les politologues locaux auraient souhaité une telle partielle, que ce soit au No. 7 ou au No. 6, si ce n’est que pour se faire une idée précise de la force de l’Alliance Lepep, du PTr et du MMM – mais aussi ce qu’une lutte à trois donnerait dans le cadre des élections générales. Mais il ne faut pas compter sur la bonne volonté de Vishnu Lutchmeenaraidoo ou de Sangeet Fowdar sous ce rapport – même si leurs jours paraissent comptés au sein de l’Alliance Lepep. Qu’en pensez-vous ?
Il faut être fou pour vouloir une élection partielle. Dans le cas présent, cela ne changera rien à la solide majorité gouvernementale Lépep. Quel qu’en soit le vainqueur, nous penserons à autre chose dans un semestre alors que nous pensons, soir et matin, à la marmite familiale à faire bouillir, à la satisfaction de la maisonnée.
Toute élection partielle est grandement dommageable à nos activités économiques et professionnelles. La productivité de tout un chacun diminue en raison de l’intérêt que nous portons stupidement à un événement aussi insignifiant. Le gaspillage électoral reprend de plus belle, forçant même nos meilleurs politiciens à corrompre des hommes d’affaires et des entrepreneurs, sous prétexte qu’il faut être marchand de couleurs pour être politicien populaire.
Ne comptons surtout sur aucun scrupule, comme sur aucun gros caillou pour mettre un peu de jugeote dans leurs esprits embrumés par une quête insatiable de popularité, achetable au premier bazar venu. Qui démissionne sans raison valable du Parlement est le premier responsable d’un tel piétinement surtout économique et dangereuse pour notre stabilité politique, notre principal atout, sinon notre carte maîtresse majeure, pour adopter un vocabulaire plus accessible à certains politiciens indignes de ce nom.
Que nous apprennent nos précédentes partielles ? La large victoire du MMM Dev Virahsawmy au No 5, en septembre 1970 n’empêche guère ce PTr lessivé de faire jeu égal avec le MMM, aux Législatives du 21 décembre 1976. Généralement parlant, nos élections partielles réussissent mieux au PTr qu’à ses adversaires. Celle de Faugoo en avril 1998, ne précède pourtant aucune victoire, à l’encontre de celle de Jeetah au No 7 en 2003, annonçant la reprise du pouvoir par Navin Ramgoolam. Qui gagne une partielle peut perdre les Législatives suivantes. Une victoire américaine de Donald Trump pourrait bien être fatale aux illusions de Marine Le Pen en France.
Notre inique système électoral du « First Past the Post » interdit toute lutte à trois. Il favorise outrancièrement l’affreuse car liberticide bipolarisation. Nous restons condamnés à choisir entre peste et choléra alors que des Hurdoyal, des Ah Yan, des Subron, des Bizlall, des Guimbeau, des Sheila Bunwaree, des Lindsey Collen, sont interdits de débats parlementaires où ils auraient trop brillé face aux muets du sérail qui y pullulent.
La faute à nous si nous ne savons pas voter avec discernement et intelligence. Nous votons « caste » au lieu de voter « compétence et patriotisme » d’où qu’ils viennent. Nous récoltons ce que nous avons déposé dans les urnes. Il ne saurait y avoir de miracle électoral. Fini le temps quand Bon Accueil pouvait plébisciter un Wahab Foondun.
* Par ailleurs, Vishnu Lutchmeenaraidoo disait dans une interview récemment que le jugement dans l’affaire MedPoint est venu « déstabiliser » le gouvernement. On en saura davantage lorsque le jugement dans l’appel interjeté par Pravind Jugnauth sera rendu – incessamment, paraît-il. Un jugement favorable pour le leader du MSM viendra-il « stabiliser » le gouvernement ? Et, qu’en sera-t-il au cas contraire ?
La sagesse et le respect de nos institutions judiciaires exigent que nous attendions ce verdict avant de faire le moindre commentaire. N’oublions surtout pas la possibilité de recourir à ce Conseil de la Reine si peu républicain.
* S’il existe un sentiment d’impatience ou de déception chez bon nombre de Mauriciens actuellement, ce sentiment va très vite passer à l’étape suivante : le rejet – si les résultats tardent ou qu’on n’arrivent pas à « deliver » sur les promesses électorales, dont celle par rapport au « deuxième miracle économique ». Il paraît que même le FMI n’y croit plus, car dans son dernier ‘Executive Board Assessment’, ses prévisions font état d’un taux maximal de croissance de 4%, ce qui est loin, dit-on, du minimum requis pour assurer le décollage économique de Maurice. Qu’en pensez-vous ?
J’ai heureusement passé l’âge de croire dans les promesses électorales. Je ne croyais même pas que nous, électeurs mauriciens, étions capables de l’alternance de pouvoir réalisée si magnifiquement le 10 décembre 2014.
Si nous croyons dans les vertus de l’alternance du Pouvoir, nous devons aspirer à un changement de régime en 2019 ou avant. Les gouvernements que nous plébiscitons doivent comprendre qu’ils n’ont que cinq ans au maximum pour nous montrer de quoi ils sont capables quand nous leur donnons l’occasion de diriger notre pays.
Rien ne me révulse autant que des ministres se permettant de nous promettre la lune d’ici 25 ou 30 ans car dans trois ans et quelques mois, ils sont amenés à céder la place à d’autres. Travaillez le plus que vous pouvez et surtout le plus intelligemment possible pour que nous puissions garder un bon souvenir de votre passage au Pouvoir.
Si miracle économique il doit y avoir, ce sera l’œuvre glorieuse de l’ensemble des travailleurs mauriciens et non pas la jactance de tel ou tel ministre.
« Miracle économique » : nous ne demandons pas mieux à condition qu’il soit équitablement partagé, en permettant pour commencer aux moins fortunés de rattraper leur retard. Si « miracle économique » signifie que certains privilégiés – sinon fils à papa – pourront, d’ici 2019, dormir sur des matelas bourrés de milliards de dollars, en quoi voulez-vous que cela m’intéresse ?
Si le miracle économique escompté consiste à ce que Maurice se classe dans une catégorie de pays à revenus encore plus huppés, alors que chez nous se multiplient des zones de pauvreté, des familles désunies, des filles-mères avec plusieurs enfants à charge mais sans conjoints-géniteurs pour les aider à donner à ces derniers le bonheur terrestre auquel ils ont droit, pourquoi voulez-vous que je courre derrière un miracle économique aussi désastreux ?
Il ne saurait y avoir le moindre progrès économique si nos frères et sœurs moins chanceux sont abandonnés dans la solitude de leur détresse. Il y aura un véritable miracle économique si un Premier ministre plus courageux que ceux que nous avons eu à ce jour se révèle miraculeusement capable d’interdire absolument que l’écart des revenus réguliers, entre nos plus riches et nos plus pauvres, dépasse la fourchette de un à vingt, pour commencer.
Le plus riche parmi nous ce n’est pas celui qui collectionne des valises bourrées de devises étrangères mais celui qui crée le plus d’emplois productifs possible (Merci CMT !), celui qui peut rendre sa dignité humaine aux Mauriciens les plus désespérés.
* Les finances publiques sont déjà dans le rouge avec l’augmentation de la dette publique. Viendront s’ajouter à ce stress financier le paiement du PRB prochainement et des ‘debentures’ des souscripteurs au plan ‘Super Cash Back Gold’, soit presque Rs 3 milliards annuellement sur une période de cinq ans. Véritable challenge pour tout ministre des Finances – qu’il soit Anerood Jugnauth ou meme Pravind Jugnauth éventuellement ?
Il est infiniment malheureux que nous n’ayons nullement notre mot à dire en matière d’augmentation du montant de la dette publique. Si référendum, il doit jamais y avoir à Maurice, il serait souhaitable que nos prochains gouvernements obtiennent au préalable notre large assentiment référendaire avant d’augmenter notre dette publique par, disons, plus d’un milliard de roupies.
L’initiative de débarrasser Port-Louis asphyxié, en délocalisant une dizaine de ministères et pourquoi pas notre Cour Suprême, Cour Intermédiaire et criminelle et tribunaux spécialisés, est excellente. Mais cela peut se faire plus modestement avec un ou deux milliards de roupies, pour l’aménagement du nouvel espace bureautique devant, hélas, remplacer nos excellentes terres agricoles de Minissy (jadis, une quarantaine de tonnes de sucre à l’arpent, bon an mal an).
Pourquoi gâcher une si belle initiative en gonflant démesurément et dangereusement la dette publique que devront rembourser les enfants de nos enfants ? Voulez-vous qu’ils crachent sur nos tombes ?
D’aucuns pensent que plus la dette publique sera intolérable et plus juteuse sera la commission de certains Messieurs bien placés. Si cela est vrai, nous aurons alors à désespérer de notre beau pays Maurice.
Pour le Super Cash Back Gold, j’ai besoin de savoir, au cas par cas, si j’ai affaire à de malheureuses victimes, se retrouvant vraiment dans une détresse en raison d’un Ponzi Scheme, même si elles sont coupables de certaines imprudences ou si j’ai affaire à de vils spéculateurs voulant gagner à tout coup y compris au détriment des contribuables mauriciens. Si maldonne ou Ponzi Scheme il y a, nous devons savoir qui en sont les coupables et qui doivent rembourser jusqu’au dernier sou l’argent malhonnêtement acquis.
Et le Pouvoir, entre autres, politique – incapable de faire régner une justice aussi élémentaire – devient complice de pareil détournement. Nous sommes loin du compte. Le piétinement des enquêtes ne me dit rien qui vaille.
En ce qui concerne le PRB, posons correctement le problème : si généreux PRB il doit y avoir, ce sont nous, contribuables, qui devrons payer la note. Nous exigeons qu’on nous demande notre avis par référendum, au besoin, avant de se montrer généreux avec notre argent.
* Comme un malheur ne vient jamais seul, voilà une autre affaire qui défraye l’actualité : un ministre aurait recherché, allègue-t-on, un soutien financier auprès d’un promoteur pour des activités au niveau de sa circonscription en échange d’un permis délivré par son ministère. Une bande sonore aurait été remise à l’ICAC… Comment réagissez-vous à cela ?
Une enquête est en cours. Elle seule peut nous dire si ces allégations sont fondées ou pas. Nous devons avoir la patience d’en savoir davantage et, à coup sûr, avant de commencer à nous forger un jugement personnel. L’ICAC n’a pas particulièrement brillé à ce jour par sa capacité de faire promptement la lumière, à la satisfaction du public, sur de ténébreuses affaires qui lui ont été confiées.
Mais un miracle est toujours possible. Il ne sera peut-être pas économique mais il saura nous faire plaisir. Nous pouvons heureusement compter sur notre presse de plus en plus investigatrice et, de moins en moins, excessivement prudente. N’ayant pas entendu cette bande sonore, nous n’avons pas la capacité de savoir si elle constitue une preuve accablante acceptable ou non devant une cour de justice. Ayons la patience d’en savoir davantage avant d’oser porter un jugement. Ne minimisons pas la possibilité qu’un piège ait été tendu à un de nos ministres. La patience la plus grande est de mise en pareil cas.
* Au vu de ces nouvelles circonstances, on voit difficilement Sir Anerood vouloir « step down » dans l’immédiat pour céder le prime ministership à Pravind Jugnauth, même en cas de jugement favorable de la Cour dans l’affaire MedPoint. En tant que politicien de carrière ayant un certain poids politique ainsi que diverses expériences de crises, il pourrait choisir de rester afin de « put his house in order » avant de céder le prime ministership. Qu’en pensez-vous ?
Même si Pravind Jugnauth était demain acquitté et lavé de tout soupçon (que je n’ai jamais eu à son égard), je ne vois pas pourquoi son père devra lui céder le fauteuil de Premier ministre. Jusqu’à preuve du contraire, nous, électeurs, avons fait confiance à une alliance électorale Lépep, dirigée par nul autre qu’Anerood Jugnauth.
Malgré son âge vénérable, il fait preuve d’une détermination qui suscite le plus grand respect. Il lui appartiendra un jour de passer le flambeau de la charge de Premier ministre à son fils ou à tout autre ministre, si l’envie lui prend. Nous lui avons majoritairement fait confiance le 10 décembre 2014. Nous nous sommes condamnés, ce jour-là, à continuer à lui faire confiance jusqu’en 2019. Penser autrement, ce serait aller à l’encontre du vote majoritairement souverain de l’électorat mauricien du 10 décembre 2014. Même ceux qui n’ont pas « viré Mam », le 10 décembre 2014, doivent respecter le vœu de la majorité exprimée ce jour-là. Le respect de la Démocratie la plus élémentaire l’exige.
* Parviendra-t-il, selon vous, à renverser la vapeur – et à sauver son gouvernement?
Qui parle aujourd’hui de la nécessité pour Anerood Jugnauth de devoir renverser la vapeur et de sauver son gouvernement ? Nous l’avons connu dans des situations infiniment plus difficiles.
• Pensons à octobre 1982 quand il cède à un ukase stalinien et doit révoquer bien injustement des ministres PSM aucunement responsables d’une sordide querelle d’ego surdimensionnés entre militants, entre anciens compagnons de lutte.
• Pensons à mars 1983 quand, à la sortie d’un comité central mauve et militant, des tapeurs de ce parti se mettent à cracher sur Baï Anerood et à brûler Ramsahok à coups de cigarette allumée.
• Pensons à la débandade de l’après Amsterdam Boys, en 1986.
• Pensons à ses déboires de 1990 quand il se retrouve minoritaire face à la campagne antirépublicaine et anti-Bérenger, formentée par Navin Ramgoolam, revenant tout frais émoulu d’Angleterre.
• Pensons à son « batté bef » reconnu publiquement et fort courageusement au soir du scrutin du 17 décembre 1995.
• Pensons aux deux attentats auxquels il a échappé miraculeusement.
Avec la confortable majorité parlementaire dont il dispose présentement, il peut voir venir des jours plus difficiles sans perdre sa sérénité. En 1982, il pouvait vaciller sur son trône en se disant in petto : « Je dois peut-être mon élection et mon gouvernement au MMM de Bérenger ». En 1986 et 1990, il pouvait encore se dire devoir une partie de son élection à l’alliance bleu-blanc-rouge. Mais en 2016, quel député Lépep peut dire : « Je ne dois pas à Baï Anerood mon élection » ?
* Published in print edition on 25 March 2016
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