Humeur d’avril
|On ne peut pas constamment vivre avec le monde et le regarder comme une entité à part.
Il faut bien être dans le monde, et mieux encore, voir le monde en soi ; le monde réel et la vraie vie en quête d’unité et de bonheur
Il y a quelques années, le dérèglement climatique ne s’était pas encore fait sentir jusqu’à dans nos contrées. Jadis, le mois d’avril était le mois béni qu’on attendait en notre for intérieur après la saison d’été – toujours trop longue une fois passée l’atmosphère festive parfumée de letchis et décorée de flamboyants rouge vif et animée des cadeaux et repas de fin d’année -, et qu’on se mette à s’abriter des rayons d’un soleil de plus en plus éblouissant.
Cette chaleur qui épuise le bon peuple, enfants, adultes et personnes âgées, et on se presse, une fois libéré des diverses obligations de la journée, de rentrer chez soi. Ah ! Cette chaleur-là! On se plaint un peu partout, dans la rue, au marché, dans le bus, et aussi à ses proches se prélassant sous le jacquier du jardin, un éventail à la main. La terre et les arbres s’essoufflent aussi. Ouf ! Soupire-t-on, ce soleil qui dit : « moi ki là », en bon créole ; vivement que cela se termine ! Véritable accalmie, les pluies diluviennes et vents cycloniques.
Il est vrai que l’espérance de vie est moindre dans les pays chauds : la peau cuite au soleil, les cheveux brûlés, les yeux abîmés, le corps s’affaiblissant plus vite, et aussi un service médical insuffisant et inégalitaire. Nos semblables vivent plus longtemps dans les pays où l’hiver ne fait pas semblant et couvre tout de gris et de blanc durant des mois. Comme disait l’autre, le froid, cela conserve la viande.
Le soleil d’été semble lâcher prise pendant le mois d’avril depuis l’an dernier, et on retrouve une fin d’avril qui rappelle la douce lumière d’antan, empreinte d’une compassion qui permet aux plantes, fleurs, arbres, animaux et aux braves gens de reprendre leur souffle.
Jadis le rêve d’une vie plus confortable qu’on se permettait dans notre cœur de jeune fille était d’abord ce désir d’un climat plus clément, d’un soleil moins ardent qui rendrait le trajet Triolet-Rose-Hill plus supportable après une journée au collège et qu’on a hâte d’enlever l’uniforme cateau vert humide de transpiration. Cette journée au collège paraissait toujours trop longue mais heureusement, c’était agrémenté du cadre même du collège : le son de l’eau glissant sur les galets du ruisseau, le grand terrain vert très British, la ravine boisée s’offrant au regard chaque matin et les rires et le bavardage pendant la récréation. Pour le reste, disons que dans l’enfermement entre quatre murs, on s’ennuyait ferme…
C’est en appréciant ces moments exaltants de ce changement de saison qu’on avait appris le décès d’un chanteur français, Richard Anthony, à l’âge de 77 ans. Une image attendrissante du chanteur, jeune homme timide chantant ‘J’entends siffler le train et j’entends siffler le train’, dans un clip en noir et blanc sans fard ni gesticulations effrénées sur scène, une chanson qui fait chaud au cœur.
L’autre image du chanteur vieillissant, chantant la même chanson, conserve tout le charme de sa voix et aussi notre bonheur à l’écouter. Ce Son effaçant les années écoulées et imposant la permanence de l’instant présent – cet instant que fait revivre une parole, une musique, une odeur qu’on pensait enfoui dans le passé.
De même, l’image d’un Michel Polnaref, à plus de 70 ans, n’enlève rien au charme de la personne et la joie de l’écouter C’est une poupée qui dit : « Non, non, non, non, non. Toute la journée, elle dit non… ». Il y a trois semaines, dans une coquette maison dans la banlieue ouest de Paris, chez des amis mauriciens de longue date, Josiane et son époux musicien, les bons moments de nos vingt ans ont retrouvé leur flamme. A Maurice, elle s’essayait à la chanson avec notre Mario national quelques années avant que celui-ci ne nous entraîne avec ‘Les Démons de Minuit’, et que Gilbert Zuel de Blue Stars sorte son seul album ‘La pli-là tombé do mama, la pli-là tombé, kot mo passé dilo rant dan mo soulié’. Gilbert dont on était si fier de son one-man show.
On ne peut pas constamment vivre avec le monde et le regarder comme une entité à part. Il faut bien être dans le monde, et mieux encore, voir le monde en soi ; le monde réel et la vraie vie en quête d’unité et de bonheur. En attendant, que d’occasions ratées ! Il n’y a pas eu de ‘Je Suis Garissa’ et pourtant, de jeunes étudiants se sont fait froidement assassiner, et d’autres se sont fait jeter par-dessus bord d’un bateau parce qu’ils étaient Chrétiens par ceux qui cherchaient quand même refuge dans un pays chrétien. Tout un paradoxe.
Un ami algérien assure qu’à long terme tous ces actes extrémistes servent l’intérêt de l’Amérique et l’impérialisme européen à une question sur la méconnaissance ou plutôt la déformation de l’histoire politique et celle des religions chez des personnes rencontrées et qui sont d’origine maghrébine. Quant à la mémoire du public français, c’est désespérant ! L’ancien Président français, revenu dans l’arène politique, réussit à rafler les votes des électeurs pour son parti. La mémoire courte fait oublier aux électeurs qu’il est responsable du fait que la Libye n’existe plus comme pays aujourd’hui.
Accroché à une série de révélations qui a débuté au rythme d’une Friday Arrest, on ne sait pas encore si c’est la sirène de la Polizia que va entendre siffler une, accusée des pratiques financières douteuses, suite à la détermination de ceux qui ne font pas dans le cata cata.
L’ex-ministre réduit au statut peu viril de poupette qui dit : « oui oui oui oui oui », en bref, un yes-man, rien d’étonnant. Pour les bonhommes angoissés de la tournure que vont prendre les choses dans les jours à venir et frustrés de ne plus être le maître de leur destin ni de celui du pays, il y a la consolation du démon de midi… auprès de quelques fidèles groupies.
Quant à nous, pour la énième fois, nous nous posons sérieusement la question de la dérive de la démocratie vers la ploutocratie, le pouvoir des riches. A commencer par l’exemple que donne la plus vieille démocratie au monde : les Etats-Unis.
* Published in print edition on 24 April 2015
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