Shakuntala Boolell

Lauréat : dans quelle logique ? Collège, leçons, preuve de ses compétences…

 

— Shakuntala Boolell

 

Les noms figurant au palmarès de 2010 soulèvent de nouvelles réactions. Tradition oblige ! Mobilisation de la presse parlée et écrite. Une façon de montrer que nos écoles acceptent le système et fonctionnent avec.

 

Lors de la proclamation des résultats, c’est le même scénario. Dans la cour des collèges on voit les explosions de joie et les ovations à l’égard des lauréats. Une bourse due au seul mérite de l’élève, de ses enseignants au collège ou en privé ?

 

Pourquoi n’entend-on jamais « Mo remercier surtout mes profs leçons ». A croire que les profs de leçons ne rencontrent qu’en privé leurs poulains et pouliches et comptent à chaque fois le nombre de lauréats formés sur leurs bancs en attendant de préparer une nouvelle élite.

On se demande aussi pourquoi ces profs dont la réputation s’est bâtie d’année en année ne viennent pas commenter sur les résultats. L’on sait tous que les leçons ont la vertu de corriger les failles du système en place.

 

Collège : quels rôles ?

 

Combien sont les parents qui ont des reproches à faire contre le collège que fréquentent leurs enfants ? Et pour cause. « Pas assez de devoirs, cahiers pas vérifiés, absence des enseignants ou tout bonnement pas de professeurs pour un sujet ! » En HSC, c’est pire. A l’approche des examens — d’internal en juillet et de Cambridge en octobre, novembre — des semaines entières d’affilée des élèves ne viennent pas en classe. Pour quelles raisons ? Des classes vidées à cause des révisions et de la compétition, retard dans le syllabus, des examspapers travaillés beaucoup pendant les leçons.

Comment alors parler de rayonnement de tel collège ou autre ? On nie l’évidence même: sans les leçons peut-on être lauréat ? A lire les commentaires dans nos quotidiens les lauréats sont esclaves des leçons à cause du système. Presque tous ont passé leur week-end sur les bancs des profs de leçons. Pour les lauréats travailler le triple de ses concurrents oui mais grâce aux leçons !

 

Shakespeare jugé par Flaubert

 

« Quel homme ! Les plus grands ne lui vont qu’au talon, celui-là. Ce n’était pas un homme, mais un continent. » Peut-on en dire autant de nos lauréats ? On les considère souvent hors du pair. Bon nombre d’entre eux ont abattu de la besogne. Sans aucun doute. Mais l’investissement personnel : qu’est-ce que cela veut dire ? Avoir une dose massive de notes, apprendre par cœur ce que les enseignants font copier, passer 7 jours sur 7 à prendre des leçons, et se pencher sur les devoirs jusqu’à en être malade…

A croire que c’est de plus en plus ça. Le chance s’ajoute à cette énergie dépensée dans une certaine mesure. Mais quels produits sont ces lauréats à l’âge de 18 ou 20 ans ? Nos lauréats sont-ils tous capables de disserter de la politique, de leur patrimoine et de la société d’abondance ? Du point de vue de deux enseignants de General Paper, il n’y a plus de débat enivrant. D’autres profs regrettent les années 80, 90 où entre les élèves et les profs l’interaction était suprême. Eh bien ! maintenant plutôt one-man show.

 

Echapper à cette logique : l’élève sans égal

 

Il est de ces élèves qui ont cru avoir la première place sur le podium sans les leçons. Hélas ! Impossible même de se classer parmi les 20. Fallait-il mettre de l’eau dans son vin ? Comprendre que sans doubler la mise avec les leçons pas de mieux-être. Cet élève qui a voulu passer son week-end en famille et voir ses émissions sur Canal Plus ou autre chaîne n’a-t-il pas encore plus de mérite ? Il a d’autres valeurs plus humaines. L’ambition, il doit l’avoir aussi, mais pas au prix de ceux pris dans un système qui engendre des esprits dont on surfait les qualités.

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