Une proportion grandissante de jeunes Mauriciens explore des perspectives internationales

Eclairages

Par A. Bartleby

Les jeunes Mauriciens, qui représentent environ 30 % de la population, envisagent de plus en plus leur avenir à l’étranger, attirés par de meilleures opportunités et des conditions de vie plus favorables. C’est l’une des principales conclusions du dernier sondage Afrobarometer, qui examine les priorités, les évaluations et les perspectives de cette tranche de la population.

L’absence d’opportunités pour les diplômés et les professionnels qualifiés ne pousse pas seulement ces talents à quitter le pays, mais décourage également le retour des membres de la diaspora mauricienne. P – YouTube

Pour cette enquête, l’équipe Afrobarometer à Maurice, dirigée par StraConsult, a interrogé un échantillon nationalement représentatif de 1 200 Mauriciens adultes entre avril et mai 2024. Des sondages similaires avaient précédemment été réalisés en 2012, 2014, 2017, 2020 et 2022, permettant une analyse des tendances au fil du temps.

Malgré une baisse notable du chômage des jeunes ces dernières années – de 23,2 % en 2013 à 18,2 % en 2023 – ces derniers restent trois fois plus touchés par le chômage que la population en général. Cette situation reflète non seulement des défis économiques globaux, mais aussi des obstacles spécifiques aux jeunes, tels qu’un manque de formation professionnelle adéquate et une absence d’expérience demandée par les employeurs.

Les jeunes âgés de 18 à 24 ans sont particulièrement préoccupés par l’écart entre les qualifications académiques et les exigences du marché du travail, un problème cité par 20 % d’entre eux. En outre, certains employeurs perçoivent les jeunes comme peu enclins à accepter des emplois dans des secteurs jugés moins attrayants, tels que l’agriculture ou les métiers exigeants. Cependant, seuls 10 % des jeunes partagent ce point de vue, révélant une déconnexion entre les perceptions des générations plus âgées et les réalités vécues par la jeunesse.

L’exode des compétences : un défi national

Par ailleurs, une des tendances les plus alarmantes pour l’avenir de Maurice est l’augmentation significative du nombre de jeunes envisageant l’émigration. En 2024, près de trois jeunes sur quatre (74 %) âgés de 18 à 24 ans ont déclaré avoir pensé à partir, dont 38 % y ont réfléchi « beaucoup ». Chez les jeunes de 25 à 34 ans, le chiffre est similaire, avec 73 % exprimant le même désir.

Les motivations derrière cet exode sont principalement économiques : 57 % des jeunes citent la recherche de meilleures opportunités professionnelles comme raison principale de leur désir de partir. L’absence d’opportunités pour les diplômés et les professionnels qualifiés ne pousse pas seulement ces talents à quitter le pays, mais décourage également le retour des membres de la diaspora mauricienne, malgré les efforts déployés pour les inciter à revenir.

Outre les motivations économiques, certains jeunes mentionnent la quête d’une éducation de meilleure qualité, tandis qu’une minorité cherche à fuir des conditions de vie difficiles ou souhaitent explorer d’autres cultures.

Les priorités et les perceptions des jeunes

Les jeunes Mauriciens expriment des préoccupations claires quant aux principaux problèmes du pays. Pour les 18-24 ans, la lutte contre les drogues est la priorité absolue, citée par 40 % d’entre eux, tandis que les 25-34 ans mettent en avant la hausse du coût de la vie, également à 40 %. L’insécurité et le chômage figurent également en tête de liste des préoccupations, avec des taux de réponse significatifs dans les deux groupes.

Cependant, les jeunes sont très critiques envers le précédent gouvernement en ce qui concerne ses performances sur ces questions clés. Seulement 35 % des jeunes de 18 à 24 ans et 34 % des 25 à 34 ans approuvent les efforts du gouvernement sortant en matière de création d’emplois, et encore moins d’entre eux le jugent efficace pour stabiliser les prix ou réduire la criminalité.

En revanche, une majorité de jeunes reconnaissent les réussites du gouvernement sortant dans des domaines tels que l’éducation, la santé, l’entretien des infrastructures et la fourniture d’électricité. Cela montre que, malgré les critiques, certains efforts sont bien accueillis, mais ils restent insuffisants pour résoudre les problèmes structurels affectant la jeunesse.

Un avenir incertain mais prometteur

Malgré les nombreux défis, les jeunes Mauriciens restent un moteur potentiel de transformation pour le pays. Leur dynamisme, leur créativité et leur aspiration à un avenir meilleur peuvent contribuer à la construction d’un pays plus prospère, à condition que leurs préoccupations soient prises en compte.

Le nouveau gouvernement, élu en novembre 2024, a une opportunité unique de répondre à ces attentes. En investissant dans l’éducation et la formation professionnelle, en favorisant la création d’emplois de qualité et en s’attaquant aux inégalités économiques, il peut non seulement réduire les taux d’émigration, mais aussi transformer Maurice en un lieu où les jeunes veulent non seulement vivre, mais prospérer.

L’avenir de Maurice repose sur sa jeunesse. Cependant, l’augmentation de l’émigration des jeunes révèle une crise latente qui nécessite une action urgente. Si des réformes profondes ne sont pas entreprises pour améliorer les conditions économiques et sociales, Maurice risque de perdre une partie importante de son capital humain.

Pour inverser cette tendance, il est impératif que les décideurs politiques, les entreprises et la société civile collaborent pour créer un environnement où les jeunes peuvent s’épanouir. Ce n’est qu’en répondant à leurs aspirations que Maurice pourra réaliser pleinement son potentiel en tant que nation moderne et prospère.

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Hunter Biden gracié : Joe Biden face à un dilemme moral et politique

Le président Joe Biden a accordé une grâce à son fils Hunter, évitant ainsi à ce dernier une possible peine de prison pour des condamnations fédérales liées à des infractions sur des armes à feu et des taxes, et revenant sur ses précédentes promesses de ne pas utiliser les pouvoirs extraordinaires de la présidence pour favoriser sa famille.

Le président démocrate avait précédemment déclaré qu’il ne pardonnerait pas son fils ni ne commuerait sa peine après ses condamnations dans deux affaires, l’une dans le Delaware et l’autre en Californie. Cette décision, prise dimanche dernier, survient quelques semaines avant que Hunter Biden ne soit condamné, après sa condamnation dans l’affaire des armes à feu et sa plaidoirie de culpabilité dans l’affaire fiscale, et à moins de deux mois du retour attendu de Donald Trump à la Maison Blanche.

Cela marque la fin d’une saga juridique de longue durée pour le fils cadet de Biden, qui avait publiquement révélé en décembre 2020 être sous enquête fédérale — un mois après la victoire de son père à la présidentielle —, ternissant ainsi l’héritage du président.

Joe Biden, qui avait promis à maintes reprises de restaurer les normes et le respect de l’État de droit après le premier mandat de Trump, a finalement utilisé sa position pour aider son fils, rompant ainsi sa promesse publique de ne pas intervenir pour sa famille.

Dans une déclaration publiée dimanche soir, Biden a déclaré : « Je crois en le système judiciaire, mais tout en luttant avec cette décision, je pense aussi que la politique brute a contaminé ce processus et a conduit à une injustice. »

Le pardon accordé par le président couvre non seulement les infractions liées aux armes à feu et aux taxes, commises par Hunter Biden, mais aussi d’éventuelles « infractions contre les États-Unis qu’il a commises ou pourrait avoir commis ou auxquelles il a pu participer entre le 1er janvier 2014 et le 1er décembre 2024. »

En juin, Biden avait catégoriquement exclu tout pardon ou commutation pour son fils, affirmant aux journalistes que, face au procès de son fils dans l’affaire des armes à feu dans le Delaware, « je respecterai la décision du jury. Je ferai cela et je ne le pardonnerai pas. »

Même le 8 novembre dernier, après la victoire de Trump, la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, avait exclu toute possibilité de pardon ou de clémence pour Hunter Biden, affirmant : « Nous avons été interrogés à plusieurs reprises à ce sujet. Notre réponse reste la même, c’est non. »

Le président a publiquement soutenu son fils unique, Hunter, qui a lutté contre une addiction grave à la drogue et a plongé sa vie familiale dans le chaos avant de se reprendre ces dernières années. Ses rivaux politiques ont souvent utilisé les erreurs de Hunter Biden pour attaquer son père : lors d’une audience, des législateurs ont même exposé des photos de son fils sous l’emprise de la drogue, à moitié nu dans un hôtel sordide.

Les républicains de la Chambre des représentants ont également tenté d’utiliser les années d’affaires douteuses à l’étranger de Hunter Biden dans une tentative d’impeachment avortée de son père. Ce dernier a toujours nié toute implication dans les affaires de son fils ou en avoir tiré profit.

« Les accusations portées contre lui n’ont vu le jour qu’après que plusieurs de mes opposants politiques au Congrès les aient instiguées pour m’attaquer et s’opposer à mon élection », a déclaré Biden dans sa déclaration. « Aucune personne raisonnable, qui regarde les faits des affaires de Hunter, ne peut arriver à une autre conclusion que Hunter a été pris pour cible uniquement parce qu’il est mon fils. »

« J’espère que les Américains comprendront pourquoi un père et un président ont pris cette décision », a ajouté Biden, précisant qu’il l’avait prise ce week-end.

Joe Biden n’est pas le premier président à utiliser ses pouvoirs de grâce pour favoriser ses proches.

Dans ses dernières semaines en fonction, Donald Trump a pardonné à Charles Kushner, le père de son gendre Jared Kushner, ainsi qu’à plusieurs alliés condamnés dans l’enquête du procureur spécial Robert Mueller sur la Russie. Trump a également annoncé ce week-end son intention de nommer le père de Kushner ambassadeur des États-Unis en France lors de son prochain mandat.

Trump, qui a promis de réorganiser en profondeur le ministère de la Justice et d’y installer des partisans après sa mise en accusation pour son rôle dans la tentative de renverser l’élection présidentielle de 2020, a qualifié le pardon accordé à Hunter Biden de « véritable abus et erreur judiciaire. »

« Ce pardon donné par Joe à Hunter inclut-il aussi les otages du 6 janvier, qui sont maintenant emprisonnés depuis des années ? » a demandé Trump, faisant référence à ceux condamnés dans l’émeute violente du 6 janvier 2021 au Capitole par ses partisans.

La décision de Joe Biden de gracier son fils Hunter, bien que compréhensible sur le plan humain, soulève de nombreuses questions sur l’intégrité des institutions et la promesse d’impartialité qu’il avait mise en avant lors de sa campagne présidentielle. Alors qu’il avait juré de ne pas intervenir dans les affaires judiciaires concernant sa famille, ce pardon donne l’impression que les standards éthiques sont malléables lorsqu’il s’agit de ses proches.

Si l’humanité et la compassion d’un père envers son fils sont compréhensibles, l’enjeu ici est la perception publique d’un double standard, notamment à un moment où la polarisation politique atteint des sommets. Pour un président qui a promis de restaurer la foi dans les institutions démocratiques, cette grâce risque de ternir son héritage bien plus que de le protéger.

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Un cas rare : Le gouvernement irlandais réélu malgré les vents contraires mondiaux

Dans un contexte global où de nombreux gouvernements ont été sanctionnés par les électeurs en 2024, l’Irlande fait figure d’exception. Les partis du centre-droit FiannaFáil et Fine Gael, membres de la coalition au pouvoir, ont réussi à éviter le sort habituel réservé aux sortants. Ensemble, leurs votes de première préférence n’ont diminué que de 0,4 point, atteignant 42,7 % par rapport aux élections générales de 2020.

Ce résultat est remarquable, compte tenu du coût de la vie élevé et de la crise persistante du logement. La performance de Fine Gael est d’autant plus notable qu’il est au pouvoir depuis 2011.

Sinn Féin : Une perte de dynamique

Lors des élections de 2020, le Sinn Féin avait surpris en devenant le premier choix de 24,5 % des électeurs. Cependant, en raison d’un nombre insuffisant de candidats, le parti n’avait pas pleinement capitalisé sur cet élan et avait obtenu moins de sièges que FiannaFáil. Depuis, le Sinn Féin s’est positionné comme un gouvernement en attente, avec des sondages atteignant un sommet de 36 % en 2022.

Toutefois, cette popularité a chuté, notamment en raison du refus du parti d’adopter une position anti-immigration, un sujet de plus en plus politisé en Irlande. Les élections locales et européennes de juin ont confirmé cette baisse, avec un maigre score de 11,8 %. Des scandales récents autour du parti, des deux côtés de la frontière, ont encore terni son image.

Lors des élections générales de cette année, le Sinn Féin a obtenu 19 % des votes de première préférence, marquant une reprise partielle mais insuffisante. Avec une baisse de 5,5 % par rapport à 2020, le parti n’a pas de voie réaliste pour accéder au pouvoir.

Pourquoi le vote pour le gouvernement sortant a-t-il tenu ?

Selon Lisa Keenan et Gail McElroy, professeurs de science politique au Trinity College de Dublin, les électeurs ont récompensé Fianna Fáil et Fine Gael pour leur gestion économique. L’Irlande bénéficie d’un excédent budgétaire de 23 milliards d’euros, soutenu par des recettes élevées provenant de l’impôt sur les sociétés. Cet excédent a permis à tous les partis de proposer d’importantes augmentations des dépenses publiques, tant courantes que d’investissement.

Fianna Fáil et Fine Gael ont ainsi rivalisé avec les partis de gauche, proposant des réductions d’impôts, une augmentation des pensions de l’État et des consultations médicales gratuites pour les enfants de moins de douze ans. Fine Gael, en particulier, a promis l’abolition des frais pour les étudiants de l’enseignement supérieur et la création de comptes d’épargne pour les nouveau-nés, avec une contribution initiale de 1 000 euros de l’État.

L’immigration, un sujet sensible dans d’autres pays, n’a pas pesé lourd dans le choix des électeurs. Seuls 6 % de votants l’ont identifié comme un enjeu prioritaire, contre 28 % pour la crise du logement et de l’itinérance. Contrairement à 2020, où le Sinn Féin dominait sur ce sujet, tous les partis ont désormais des plans solides pour augmenter l’offre de logements, réduisant ainsi cet avantage compétitif.

L’élection en Irlande de 2024 est un événement remarquable dans un contexte mondial où de nombreux gouvernements ont été sanctionnés par les électeurs. FiannaFáil et Fine Gael, malgré des défis majeurs comme la crise du logement et la hausse du coût de la vie, ont réussi à maintenir une large base électorale. Cela témoigne d’une gestion économique jugée positive, soutenue par un excédent budgétaire impressionnant. Leur capacité à proposer des mesures concrètes, comme les réductions d’impôts et les promesses d’augmentation des pensions, a certainement contribué à leur succès, malgré la montée des préoccupations sociales.

Le déclin de Sinn Féin, qui semblait être le grand vainqueur de 2020, révèle la volatilité des électeurs irlandais. Bien qu’ayant émergé comme un acteur clé sur la question du logement, le parti n’a pas su capitaliser sur ses gains initiaux, notamment à cause de son manque de clarté sur des enjeux comme l’immigration. Le scandale autour du parti, de part et d’autre de la frontière irlandaise, a encore entaché son image, réduisant ses chances d’accéder au pouvoir.

En somme, ces élections montrent un pays qui reste attaché à une gestion économique saine, mais qui a aussi besoin de réformes profondes pour traiter des questions sociales, telles que le logement, la pauvreté et les inégalités. La stabilité offerte par FiannaFáil et Fine Gael devra se traduire par des actions concrètes pour éviter de perdre la confiance des électeurs lors des prochaines élections.


Mauritius Times ePaper Friday 6 December 2024

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