Manifeste électoral : Quelques difficultés d’implémentation soulevées
|Aujourd’hui, il est clair que les Mauriciens – dans leur grande majorité – refusent d’apporter des changements majeurs à la Constitution et à leur British heritage du système politique. Il est définitivement exclu d’avoir un Président de la République détenant un excédent de pouvoirs. Néanmoins, cela ne signifie pas que les Mauriciens soient totalement heureux car ils ont mis à la porte les deux leaders qui refusaient de les écouter.
Regardons les slogans. En 2005, c’était « bizin changement ». Mais le changement n’est jamais venu. Ensuite, l’opposition de l’époque (2012) avait inventé « bizin vrai sanzman », slogan absurde que le peuple n’a jamais adopté malgré l’insistance de ces partis politiques en 2014. Dire « vrai changement », c’est comme dire « vraie fidélité » ou « vraie honnêteté » : c’est inacceptable. Les valeurs sont immuables, on ne les négocie pas sauf si on est malhonnête.
Nous le savons tous. Après chaque élection, nous vivons un moment de grâce, traduit par une trêve appréciée de la masse silencieuse, des travailleurs et des volontaires sociaux, et des citoyens engagés. Mais, suite à une période maximale de deux années au pouvoir, les partis politiques – en alliance et dirigeant le pays – reprennent le dessus et cela recommence de plus belle – l’odeur de la pourriture de la corruption envahit l’air et le peuple pleure en silence pour la patrie. Corruption interne aux institutions, accaparement des biens publics, histoires de commission, les protégés-parasites que sont la grosse majorité des advisers (qui ne conseillent en rien mais se remplissent grassement les poches sans aucune honte), et j’en passe…envahissent notre quotidien… Et cela s’empire d’élection en élection…
Mais SAJ a fait un choix en connaissance de cause et juste après la proclamation des résultats des élections, le nouveau Premier ministre a déclaré qu’il souhaiterait la collaboration de tous pour améliorer le sort de notre pays. Il serait donc temps de se tourner vers la prévention pour, espérons-le, empêcher que des inepties ne se reproduisent comme par le passé.
Achat de glucomètres : Je prendrai un premier exemple de problème à venir, tiré du manifeste électoral de l’Alliance Lepep, s’il n’y a aucun changement à l’horizon… On propose la distribution d’un glucomètre par patient. L’expérience du passé démontre que le gouvernement achète l’objet le moins cher et la plupart du temps, c’est de piètre qualité. Ou alors, pire encore, les gens disent que ce serait fait par des moyens détournés avec grosses commissions au début et en fin de transaction. Dans les deux cas, ces achats coûteraient cher à la population.
Il vaudrait mieux donner une aide financière uniquement à ceux qui en ont besoin mais qui n’ont pas de moyens pour s’en procurer. Les autres, gageons qu’ils ont déjà un glucomètre dernier cri à la maison… Maintenant, notre société est en perte totale de valeurs. Certains membres de la famille vont se rendre régulièrement à l’hôpital pour demander un glucomètre. Ils en achèteront un tous les six mois pour les revendre plus cher ailleurs… D’autres rendront visite au malade et voleront son appareil… Il faudrait proposer des balises solides afin qu’il n’y ait pas de vol d’un côté comme de l’autre de la chaîne…
Les médicaments à l’hôpital : Il faut informatiser ce secteur, revoir la manière dont les médicaments sont distribués sans ordonnance, avoir un audit du stock des médicaments, … A première vue, il semblerait qu’il n’y ait pas beaucoup de logistique à ce niveau, … Et de l’autre côté, il y a des chômeurs diplômés qui pourraient être embauchés s’ils proposent une meilleure gestion par le biais d’une petite entreprise …
Le sport : Il y a un acharnement à développer le football. Pour beaucoup de Mauriciens, ceci est associé au développement des infrastructures et aux dépenses afférentes qui se chiffrent par millions. Donc, on chuchote que les commissions sont en augmentation constante. Que fera le gouvernement pour mettre fin aux dépenses par milliards et arrêter des pratiques malsaines ?
Le travail et les sous-contracteurs : Pour beaucoup d’observateurs, il y a un monstre pestilentiel qui rôde depuis plusieurs années. C’est l’exploitation massive des travailleurs dans plusieurs secteurs quand ils sont embauchés par des « contracteurs ». Le secteur associé au travail manuel n’est pas correctement régularisé.
Prenons un chantier où le gouvernement donne un contrat à une grosse entreprise. Comment se fait-il que l’on retrouve ensuite des « sous-sous-sous-contractés » qui n’ont même pas le minimum d’outils pour effectuer le travail correctement ? Ces grosses entreprises empochent des millions au détriment du petit travailleur ou du petit laboureur…
Est-ce que la MRA et le ministère du Travail savent que beaucoup de ces « sous-contracteurs » ne donnent même pas de fiche de salaire à leur employé contractuel à la fin du mois ? Et ce que la grosse entreprise et le sous-contractant déclarent à la MRA, est-ce le reflet de leurs dépenses réelles ? Et qu’en est-il des taxes qui ne rentrent pas dans les caisses de l’Etat à cause de ce système malhonnête ? Et des dépenses, somme toute inutiles, du ministère qui contracte un prêt énorme pour effectuer ces travaux, et qui sera remboursé par l’argent durement gagné des taxpayers alors que la qualité du travail fini laissera comme d’habitude à désirer …
Des dires du commun des Mauriciens, certaines « grosses boîtes » et des « sous-contracteurs » sont proches d’un parti politique ou d’un autre. Parfois même, ils sont comme des carapates qui changent de chien régulièrement, d’une élection générale à l’autre,… Ils sont donc de tous les partis politiques.
De plus, les lois du travail répressives empêchent les syndicats de protéger les travailleurs exploités. Ces derniers, ayant peur de ne plus être embauchés s’ils dénoncent le moindre travers de l’employeur (de la petite ou de la grosse boîte), acceptent n’importe quelle condition de travail. Rambo veut-il briser cette chaîne immorale d’exploitation de l’homme par l’homme ?
Et que le secteur privé ne s’avise pas de jeter de la boue sur le secteur public ! Cet état de choses existe grâce et avec sa complicité. Ses normes éthiques – existantes mais visiblement virtuelles – corrompent la fonction publique, et non pas le contraire,…
Financement des partis politiques : La démocratisation de l’économie, et le développement des petites et moyennes entreprises sont devenus une farce par rapport aux monopoles et aux agissements de certains excellents roder-boute… qui, nous dit-on, financent les partis politiques…
Dans l’état actuel des choses, beaucoup de propositions du manifeste électoral ressemblent à des paroles en l’air : le développement de l’énergie verte exploitée par les coopératives, par exemple… Revoir le salaire des femmes dans tous les secteurs, c’est aussi s’attaquer à un problème de fond. Comment attaquer de front les coupables ? Si les partis politiques ne peuvent rien faire, alors pourquoi l’écrivent-ils dans leur manifeste ?
Pour la Fraude et la Corruption, on nous propose la création d’une institution. Au mieux, c’est tragique, au pire c’est une atteinte à l’intelligence des Mauriciens. On propose un Good Governance and Ethics Commission. Qui nommera ces gens-là ? Ce sera comme pour l’ICAC ?
Conclusion : Il faudrait renforcer les capacités d’observation de la SADC, de l’organisation de la Francophonie et je ne sais quels autres observateurs qui se sont déplacés en masse pour observer les élections. Anglophones ou francophones, ils ne tarissent pas d’éloges à notre égard. Mais leur voyage, eux aussi, est financé par des deniers publics… Si c’est pour voir uniquement le dessus de l’iceberg, c’est limitatif par rapport aux dépenses encourues…
Deux mandats consécutifs à Maurice, c’est un mandat de trop pour n’importe quel gouvernement, d’autant plus qu’il y a peu ou pas de renouvellement au niveau des ministres et députés. L’appât du pouvoir est dangereux. Par expérience, les Mauriciens savent que le deuxième mandat favorise plutôt la corruption sous diverses formes. Il y a aussi les résultats limités de chaque ministère, voire une absence totale d’accountability..
Dans les pays en voie de développement comme Maurice, il faudrait limiter la portée des mandats. Dans chaque parti politique, on devrait devenir PM ou ministre une seule fois. Les politiciens ont trompé beaucoup trop de gens, ils ont beaucoup trop menti, il y a eu beaucoup trop de discours contradictoires de leur part.
La masse silencieuse est à la recherche de politiciens sérieux, dévoués à la cause commune et au bien-être des citoyens, et qui n’ont pas le regard déjà braqué sur les biens publics… Pour l’instant, l’odeur de la putréfaction émanant de la classe politique, et le pourrissement et la dénaturation portés par leurs carapates sont toujours là… C’était uniquement une « Election-Correction ».
L’histoire nous dira si, en refusant de voter pour les « petit partis » – ne serait-ce que pour intégrer les watch-dogs au Parlement dans l’opposition – le peuple de Maurice a laissé passer sa chance de créer une alternative aux partis politiques traditionnels.
* Published in print edition on 19 December 2014
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