Le temps des choix

Titbits

Beaucoup, ici même et ailleurs, ont exprimé des craintes et des réserves sur la représentation proportionnelle ou sur les contours de cette Seconde République qui ne fait, au fond, qu’envisager une forme nouvelle de partage des pouvoirs entre la Présidence et l’office du PM, dépendant toutefois d’une majorité de trois quarts à l’Assemblée nationale, issue des urnes.

Nombreux parmi eux reconnaissent cependant que la société évolue, que les forces vives de demain auront d’autres attentes, que nous ne pouvons rester confinés dans des réflexes et des structures issus des divisions pour l’Indépendance, que les éternels arbitrages, à tout sujet, concentrés entre les seules mains du PM et du Bâtiment du Trésor sont pesants, que devoir gouverner avec 40% ou plus de la population dans l’Opposition ne nous permet pas d’affronter nos défis de développement dans les meilleures conditions.

Nombreux reconnaissent également, qu’avec ces limitations dont il faut tenir compte, une dose de Représentation Proportionnelle éviterait les 60-0 d’un autre âge, assurerait une meilleure représentation féminine et donnerait un reflet plus équilibré des courants de la société. On peut regretter que les deux Alliances ne proposent pas d’ouvrir la participation aux affaires de gestion publique à une deuxième Chambre constituée d’hommes et de femmes ayant une longue expérience culturelle, sociale, sportive ou du monde des affaires.

Beaucoup reconnaissent qu’une des principales vertus de l’Alliance PTr-MMM est de réunifier toutes les composantes de la communauté majoritaire et, plus largement, du pays dans un mouvement qui est tourné vers l’avenir et les nouvelles générations. Que le front commun des associations hindoues ait pris une position claire à ce sujet reflète, sans doute, ce sentiment. L’Alliance PTr-MMM offre des gages de sérieux sur le plan des compétences pour affronter les défis qui nous guettent, attirer des investissements importants et tirer parti des excellentes relations internationales que le PM actuel a tissées. Un Rama Sithanen, plus aguerri aux réalités sociales et plus fin politiquement, est à même de rassurer davantage que l’improbable trio d’anciens ministres des Finances en face.

La mise en valeur de l’État-Océan, la réalisation d’une Maurice Ile Durable, l’approfondissement de l’Education Hub et de l’ICT, la dynamisation du tourisme, du secteur offshore et des services financiers, la modernisation de nos infrastructures routières, des drains et du transport public, la résolution équitable de notre approvisionnement énergétique, la réduction des gaspillages, la gestion de l’eau, le sort des marchands ambulants, une croissance soutenue et une solidarité plus grande, sont parmi les chantiers qui exigent une entente mobilisant les meilleures compétences du pays.

Il n’y a guère eu de débats sur ces sujets de fond, même si, au-delà des frilosités constitutionnelles, c’est aussi et peut-être surtout de cela qu’il s’agit lors de ces consultations. Nous saurons bientôt si l’Alliance PTr-MMM, avec le MMM apportant une source complémentaire de compétences à un PTr lui-même renouvelé, aura remporté l’adhésion populaire sur ces plans. Entrée plus tardivement en campagne, la synergie des dirigeants, des équipes et des activistes, la mobilisation quotidienne des deux leaders, le charisme personnel de Navin Ramgoolam, l’accueil et l’enthousiasme des foules aux diverses réunions, leur permet d’espérer une montée en régime satisfaisante. Les dernières mobilisations du dimanche précédant le scrutin auront valeur de test ultime avant les derniers choix dans l’isoloir.

A ce jour, il reste de grands inconnus : le poids des « petits partis » jouant crânement leur carte ; et la répartition des sièges et la fameuse majorité de trois quarts souhaitée par l’Alliance PTr-MMM et requise pour une évolution constitutionnelle. Les deux partis auront-ils réussi à mobiliser leur électorat respectif et à convaincre les indécis dans la dernière ligne droite ? La partie de l’électorat, frileuse à l’idée du rapprochement historique entre le PTr et le MMM ou réticente aux réformes constitutionnelles, va-t-elle cautionner une possible instabilité future ?

En l’absence d’un autre 60-0, le rapport entre élus du PTr et ceux du MMM auront-ils une influence sur la stabilité gouvernementale et la capacité du tandem Navin Ramgoolam et Paul Bérenger, aux tempéraments si opposés, à gérer le pays avec sérénité ? Ce sera aux urnes d’en décider.

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Brèves de campagne

C’est entendu, une campagne électorale apporte souvent son lot de perles, de formules osées et de dérapages verbaux, mais il y en a quelques-unes qui méritent que l’on s’y attarde. SAJ et son second désigné, Xavier Duval, se disputent la palme ces jours-ci si on se fie aux rapports faits dans la presse.

Ainsi, SAJ aurait déclaré que seuls les “roders-bouttes” voteraient pour l’Alliance PTr-MMM. Même en comptant chichement, cela ferait plus de 500,000 roders-bouttes dans ce merveilleux pays que SAJ a dirigé si longtemps dans les années 80 ! Une boutade de plus du Vieux ?…

De son côté, Xavier Duval aurait déclaré, qu’avec l’école publique, son fils Adrien n’aurait même pas eu son CPE ! Comme c’est malheureusement le cas encore pour plus de 25% des enfants de la République, c’est un sujet qui devrait préoccuper tout le monde. Une bourde malheureuse ? On l’espère…

Néanmoins, c’est comme expert-comptable et ex-ministre des Finances, que Xavier nous surprend avec des escapades inattendues. Ainsi, il a été le premier à chiffrer l’augmentation de la pension promise par l’Alliance Lepep à environ Rs 250 millions : « Facile, kapav fer tout de suite ça ! » assura-t-il sur les ondes d’une radio privée. Deux semaines plus tard, c’est Vishnu Lutchmeenaraidoo qui rectifie et chiffre avec embarras cette seule promesse à plus de quatre milliards. Cela fait une sacrée différence…

Plus étonnant, lors d’une récente conférence de presse, Xavier Duval a déclaré qu’avec quelques réductions de dépenses de missions ou de voyages officiels, l’Alliance Lepep pourrait aisément financer une bonne partie de ses promesses électorales (chiffrées à plus de dix milliards quand même!). Ce n’est pas pousser le bouchon un peu loin? A ce rythme, Xavier risque de paraître comme un « serial gaffer ».

Vivement que la campagne prenne fin ! Mais bon, Xavier a été en poste si longtemps, au Tourisme, à l’Intégration sociale et aux Finances, qu’il hésite peut-être à mettre en cause sa propre performance alors que tous les observateurs économiques décrient la faiblesse de la croissance depuis quelques années. Alors, restons zen et sourions !…

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Partage des pouvoirs

La dernière semaine de campagne regorgera-t-elle d’autres surprises ? Il reste, en effet, les parties structurées des interventions à la station nationale de radio-télévision et l’ultime effet d’ambiance des derniers grands rassemblements comme point d’orgue d’une campagne plus intense qu’on ne l’aurait imaginé.

Le MSM a réussi la gageure de rassembler un attelage hétéroclite, avec des anciens au pouvoir (le PMSD), un ou deux anciens du MMM (notamment Ivan Collendavelloo), des anciens tout court (SAJ ou Vishnu Lutchmeenaraidoo), des zenfan lakaz, des déçus de ticket du PTr ou du MMM, et quelques têtes d’affiches sulfureuses, pour éviter un “walk-over” issu des mathématiques électorales. Reconnaissons à SAJ le mérite d’avoir témoigné d’une suffisante vitalité, à 84 ans sonnés, pour cette performance somme toute assez remarquable.

Avec des ressources et des moyens importants, le MSM, parti depuis plus longtemps en campagne, a efficacement utilisé le Web et le buzz des réseaux sociaux, même si c’est plus souvent un instrument d’amusement et de galéjades que de réflexion. « Viré Mam » a eu le temps de revirer et de dévirer, devenant une blague. Ce parti, aux frasques connues contre la presse, s’est étonnamment trouvé des alliés et des relais constants dans certaines sections de cette même presse et sur les radios privées, pour se donner de la voilure. Les ardeurs hystériques contre des journalistes de la MBC faisant leur travail semblent s’être calmées.

Tous les partis d’Opposition ont, depuis bientôt cinq ans, une couverture régulière de leurs activités et de leur moindre conférence de presse, aussi soporifique soit-elle. Bien entendu, certains se plaindront toujours, mais reconnaissons que c’est du jamais vu dans l’histoire de la chaîne nationale, même si la MBC est restée de tout temps, un bouc-émissaire commode et une institution que chacun a tenté et tentera toujours de s’approprier.

Sur les radios privées, c’est une toute autre histoire. Un hardcore des mêmes « experts » et « politologues » pseudo-indépendants, jouxtant des animateurs partisans, des faux-débats et une quinzaine d’habitués téléphoniques déballant leurs meetings gratuits de l’Opposition, se sont donnés à cœur joie. Surfant sur la vague des insatisfactions locales et les réticences, ils ont attisé les peurs autour du partage des pouvoirs et des changements constitutionnels prévus dans le programme PTr-MMM.

On en oublierait presque que question de partage des pouvoirs, SAJ avait ratifié l’accord MedPoint de 2000 avec le MMM de Bérenger et s’était, dans l’opinion publique, contenté d’un rôle de façade en laissant le soin à Bérenger de diriger son gouvernement, en pratique, pendant cinq ans.

 

* Published in print edition on 6 December 2014

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